13 questions sérieuses à Marie-Andrée

Marie-Andrée, dans le Baxter State Park (Maine, États-Unis; photo prise par Michel Biard)

Quel amateur de plein air n’a jamais voulu devenir guide de tourisme d’aventure? De transformer sa passion en mode de vie, en métier? Eh bien, après plusieurs années à en rêver, mon amie Marie-Andrée Fortin a choisi cette voie. Une voie qui comporte son lot de montagnes et de vallées, comme vous le lirez, mais qui apporte aussi de grandes satisfactions. Dans l’entrevue qui suit, Marie-Andrée nous parle de son cheminement en toute franchise.

Comment en es-tu arrivée à devenir guide de tourisme d’aventure?

À l’âge de 19 ans, j’étais plutôt influençable. Je me suis inscrite au bac en enseignement parce qu’on me disait qu’il valait mieux avoir un emploi stable et faire du plein air comme loisirs. Pendant 10 ans, j’ai eu le sentiment de ne pas être dans le bon domaine. À 29 ans, j’ai bougé les choses. J’avais fait la conception de quelques voyages en plein air pour des groupes scolaires, puis je les avais guidés. Tous mes temps libres, jours fériés et vacances ont été remplis de voyage et d’excursion. J’avais besoin d’un tremplin pour me propulser dans le domaine. Je suis allée faire une AEC [attestation d’études collégiales] au Cégep de Saint-Laurent, qui m’a confirmé que ma place était bel et bien en tourisme d’aventure.

Décris la formation que tu as suivie pour devenir guide.

L’AEC au cégep de Saint-Laurent est très intense. Les formateurs placent les étudiants en dehors de leur zone de confort durant toute la formation. L’idée est de former des guides qui sauront être dans leur propre zone de confort lors d’évènements fâcheux ou de température difficile afin de répondre aux besoins des participants que nous guidons. J’y ai appris des savoir-faire: kayak, canot d’eau-calme et d’eau vive, ski de fond, télémark, traîneau à chien, orientation carte et boussole, communication, météo, gastronomie en plein air.

Qu’est-ce que tu aimes le plus de ton métier?

Les gens. Leur sourire, leur joie, leur émerveillement. J’aime prendre soin des gens, cuisiner, conduire, interpréter le milieu, transmettre des connaissances.

Qu’est-ce que tu aimes le moins de ton métier?

C’est beaucoup d’heures de travail, le métier de guide doit être une passion.

Quelles sont les qualités d’un bon guide?

Être courtois, passionné, aimable et serviable. Le guide doit être capable d’être maman, cuisinier, bon conducteur, leader, à l’écoute des besoins, souriants, je l’ai déjà dit passionné?

Comment te prépares-tu avant de rencontrer un nouveau groupe?

Il y a plusieurs étapes de logistique: préparation du matériel et du véhicule avec remorque ou porte-bagage, préparation et lecture de l’itinéraire et de l’interprétation, contact des hébergements et restaurants ou encore préparer un menu pour tous les repas, puis une liste d’épicerie, faire l’épicerie, empaqueter les aliments pour la conservation durant le voyage, abonnement téléphonique adéquat pour la région, vérifier mon propre matériel, trousse de premiers soins et de réparation sur le terrain, préparer une liste de musique pour l’écoute à bord du véhicule, lecture des heures d’arrivées par avion. Puis, préparation de la présentation du guide (moi) et du voyage aux participants, cartes, livres, petit cours sur la monnaie.

Selon toi, quelle est la clé pour créer une bonne atmosphère au sein d’un groupe?

Savoir écouter les gens, puis utiliser leurs expériences de vie afin de créer des liens. Sourire et rire. Guider c’est comme entrer en scène, être émerveillé avec eux, proposer des photos de groupe, des “tchins” de vacances.

Comment gères-tu les différences de personnalités à l’intérieur d’un groupe?

Oulàlà! Généralement, les gens sont plutôt compréhensifs et ouverts d’esprit. Il m’est arrivé très peu souvent d’avoir à intervenir. Les gens vont éviter la personne avec laquelle ils ont moins d’affinité. J’ajouterais que dans tous les cas où il y a eu des différences ou bien des froids, c’est parce que la personne est insécure durant le voyage. Chose qui est très facile à reconnaître, les gens vont habituellement poser beaucoup de questions et passer beaucoup plus de commentaires que tous les autres.

T’arrive-t-il d’éprouver des craintes, quand tu guides? Si oui, lesquelles?

Parfois. Est-ce que j’aurai suffisamment de bouffe? Ha ha. Je dirais davantage stress que craintes. Je me sens bien formée pour effectuer mes tâches. Sur un nouveau circuit, il est stressant de ne pas connaître l’itinéraire, savoir quand tourner, où sont les bons endroits pour de la photo, pour dîner en route, les abris en cas de pluie. Il y a aussi le stress que les bris de matériel occasionnent, un réchaud qui te laisse tomber par exemple. Ou encore, un client qui a un choc vagal.

Quelle fut la situation la plus extrême à laquelle tu as été confrontée?

Il y en a deux. La première est une excursion en montagne, l’hiver dans un blizzard avec des vents de 80 km/h, une température ressentie de -35. J’initiais deux amis au camping d’hiver et à la longue randonnée. Un des deux en est sorti avec une gelure à un orteil. Le mauvais équipement et la mauvaise planification en ont été la cause.

La seconde, ce fut lorsqu’un participant a fait un choc vagal à 2300 m d’altitude dans le pierrier dans l’Ouest canadien. Ce fût extrême, mais très bien géré.

Quelle a été ton expérience préférée?

J’en ai plusieurs, mais la première qui me vient à l’esprit est celle où j’ai guidé pour la première fois toute seule. La traversée des Chic-Chocs en Gaspésie. Pour la première fois, je pouvais réaliser pleinement tous mes acquis, mes compétences et mon savoir-faire. Je garde des sourires plein la tête des participants que j’ai eus.

Quelle serait ton expérience de rêve?

Guider et faire du coaching en développement de leadership sur la banquise au Groenland.

Quels sont tes projets de voyage?

En avril, je planifie explorer le Yukon en canot, en vélo et en randonnée. Puis, En octobre 2013, j’aimerais vivre un mois en aide internationale en Afrique.

En 2014, nous sommes quatre guides qui sommes en train de planifier la traversée mont Tremblant jusqu’à Kuujjuaq en ski de fond en autonomie. Nous aimerions reproduire une expédition qui a eu lieu en 1980. Nous voulons mettre en film cet exploit, mais aussi en faire un projet de sensibilisation et d’éducation aux saines habitudes de vie, mais aussi aux enjeux socio-économiques et territoriaux. Le projet s’appelle Karibu et sera exposé sur la toile Internaute à partir de janvier 2013.

La suite de cette entrevue sera publiée ce jeudi.

2 thoughts on “13 questions sérieuses à Marie-Andrée

    1. Stéphane Pageau Post author

      Il n’est jamais trop tard, mon amie a travaillé dix ans comme enseignante avant de changer de carrière. Alors, si ton frère a vraiment cette passion, fais pression sur lui pour qu’il prenne le bon chemin… ha ha.

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