Laurent Claudel, du blogue One Chaï, aime visiter des destinations hors des circuits touristiques habituels. Ses voyages lui ont ainsi permis de vivre toutes sortes d’expériences peu communes. Dans cette deuxième partie d’entrevue, il raconte quelques-uns des moments plus légers de ses périples.

L’objet dont tu te sers le plus en voyage?

Je peux en donner deux? Ils sont complémentaires. Mon appareil photo et ma boussole. Je passe un temps fou à prendre mes photos. Ça ne m’est d’ailleurs possible que parce que je voyage le plus souvent seul. Personne n’aurait la patience de m’attendre, je pense! La boussole pour ne pas perdre le Nord;-), mais également pour l’orientation d’un lieu et savoir à quel moment de la journée il me faudra éventuellement revenir pour y prendre des photos.

L’objet dont tu ne te sers jamais, mais que tu apportes toujours quand même?

Avec le temps, les objets que je ne sers pas ont disparu de ma liste. Il en reste un néanmoins que je n’ai encore jamais utilisé et que je persiste à prendre, c’est la carte de mon assurance de voyage avec le numéro de téléphone à appeler en cas d’urgence. J’espère bien ne jamais avoir à m’en servir!

L’objet qui n’existe pas encore, mais que tu aimerais inventer pour faciliter les voyages?

L’eau en poudre! Je voyage le plus souvent dans des pays chauds, du coup, quand il fait 40°, c’est un peu pénible de devoir porter de l’eau. Donc il faudrait de l’eau en poudre. Et par je ne sais trop quel miracle, quand tu dissous cette poudre dans un litre d’eau, tu en obtiens quatre!

Le souvenir le plus ridicule que tu as acheté en voyage?

Un cadre lumineux animé avec Ganesh acheté évidemment à Delhi. C’est ultra kitsch, mais j’en étais tellement fier que je l’avais posé sur mon bureau au boulot. Mais il ne fonctionne plus. Il s’allume, mais ne tourne plus. Tu comprends mieux pourquoi il me faut retourner en Inde maintenant!

L’aliment, boisson ou mets que tu aimes comparer d’un pays à l’autre?

Le chaï évidemment! Et c’est en Inde qu’il est le meilleur!

Le groupe ou musicien-ne que tu préfères écouter en voyage?

Je n’ai pas vraiment un groupe qui écraserait tous les autres, mais puisqu’il faut n’en garder qu’un, je dirais The National, un excellent groupe de rock indé américain. Le chanteur a une voix de baryton très chaleureuse.

Des découvertes artistiques que tu as faites durant tes périples que tu aimerais partager avec les lecteurs (peinture, musique, littérature, etc.)?

En littérature, ça va te rappeler quelque chose, L’Usage du Monde de Nicolas Bouvier. Aussi incroyable que ça puisse paraître, je n’avais jamais entendu parler du bonhomme et c’est une Française croisée en Inde qui m’a fait découvrir ce chef-d’oeuvre de la littérature de voyage.

Au rayon musique, Nusrat Fateh Ali Khan. Un musicien pakistanais qui était le maître incontesté du qawwalî. Ça demande un peu d’effort au début pour accrocher, mais il faut persister.

Laurent, au col de Khunjerab au Pakistan. Le col est un poste-frontière avec la Chine. C’est d’ailleurs, à 4693 m, le poste-frontière le plus élevé du monde. (Crédit photo: collègue du douanier qui est à côté de Laurent)

La superstition dont tu ne peux te débarrasser en voyage, si incongrue soit-elle?

Alors là je sèche. Je ne suis vraiment pas superstitieux, ce qui peut-être un problème d’ailleurs pour comprendre certaines cultures en voyage. Je peux demander aux lecteurs de répondre pour moi?

Le pays que tu as préféré et pourquoi?

Le Pakistan et plus particulièrement le nord, la vallée de Hunza. Ce pays fut une véritable claque pour moi. J’y ai trouvé des paysages incroyables, des gens d’une générosité et d’une bonté d’âme très touchante. Il est généralement admis que cette vallée de Hunza a été la source d’inspiration de James Hilton pour la Shangri-La dont il parle dans son livre Les Horizons Perdus.

Enfin, les voyageurs qu’on y croisait étaient généralement assez matures. Le Pakistan n’a jamais vraiment été LA destination à la mode pour les full moon partys, si tu vois ce que je veux dire. Les gens qui y allaient étaient dans leur vaste majorité très respectueux des locaux et ça aussi ça fait du bien.

Le pays que tu as le moins aimé et pourquoi?

Je rentre rarement déçu d’un voyage, mais il est vrai que quelquefois, on met la barre un peu trop haut et on peut-être un peu déçu. Ça risque peut-être d’en surprendre plus d’un, mais je dirais le Cambodge. J’y ai passé de bons moments, mais à part Angkor, je n’ai pas accroché. À ma décharge, je n’étais pas en très grande forme et j’ai fini par me rendre compte à Phnom Penh que je ne supportais pas du tout le Larium (traitement anti-palu). J’étais assez déprimé, c’est un des effets secondaires possibles de ce traitement que j’ai alors interrompu.

Ton plus beau souvenir de voyage?

Mon arrivée à Varanasi en Inde. J’y étais arrivé au petit matin après un voyage en train de nuit. Alors que je cherchais un hôtel, je me suis perdu dans la vieille ville et me suis retrouvé donc sans le vouloir sur les rives du Gange (les ghats) qui étaient envahies de pèlerins venus y faire leurs ablutions. Le soleil se levait juste et une brume orangée flottait au-dessus du Gange. J’étais encore à moitié endormi et n’en revenais juste pas de ce spectacle.

L’expérience de voyage que tu ne souhaites jamais revivre?

Avec le temps, les pires galères se transforment en souvenirs cocasses donc j’ai un peu du mal à trouver une réponse. Mais je me serais bien passé de ma petite visite à l’hôpital de Chitral au Pakistan. J’avais attrapé un parasite assez sympathique du nom de giardia. Je passe les détails, mais je me suis littéralement vidé. Une nuit vraiment abominable avec crampes d’estomac… bouh! Au petit matin, alors que je cherchais un médecin, le patron de l’hôtel m’a amené à l’hôpital ou on m’a gardé une journée pour me remettre sur pied avec une perfusion de glucose et de sels minéraux. Le médecin était adorable, mais j’aurais autant aimé le croiser au resto que là!

Un secret de voyage que tu n’as jamais révélé… jusqu’à maintenant?

Alors là, j’ai bien du mal à trouver une réponse. Mais j’ai déjà fait une pirouette pour la superstition, donc je n’ai plus de joker, je suppose ! En cherchant bien, j’ai un demi-secret. Demi parce que mes compagnons de voyage (je ne voyageais pas seul pour une fois) en ont été témoins. Lors d’un trek au Ladakh (nord de l’Inde), j’étais allé chercher un coin discret au bord de la rivière pour me laver. Forcément, à 4000 m, l’eau de la rivière est super froide, mais il y avait pas mal de soleil donc c’était le moment ou jamais. Après avoir donc trouvé un coin à l’abri des regards, je me déshabille et commence à me laver. Sauf que l’endroit où je me trouve n’est en fait pas commode du tout, la rive est trop pentue. Je me décale jusqu’à trouver une belle dalle. Mais je n’ai plus mes lunettes (forcément pour me laver) et sans lunettes, je suis myope donc je ne vois plus grand-chose au loin. Je me lave donc énergiquement, m’essuie, me rhabille et remets mes lunettes pour constater… que je suis en fait maintenant à la vue de tous ! Je ne suis pas particulièrement pudique donc je m’en fou un peu, mais vis-à-vis de nos guides Ladakhis, c’est tout de même la honte. On est très pudique dans ces régions. Se mettre torse nu en public est inapproprié, donc à poil total … :-(

Je tiens à remercier Laurent Claudel, du blogue One Chaï, pour cette entrevue, pour ses réponses intéressantes et généreuses. Je crois qu’il a bien démontré que faire fi des idées préconçues et aller visiter des pays moins populaires peut apporter beaucoup à la personne qui franchit ce pas. Je lui souhaite bonne chance dans tous ses projets.