13 questions légères à Claudine

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Dans la première partie de cette entrevue, mon amie Claudine Barrette, psychologue M.Ps et globe-trotteuse, a répondu à mes questions sur les impacts des voyages sur la psychologie de l’individu. Dans cette deuxième partie, elle nous parle de ses expériences de voyage, avec cette même générosité qui a donné tant de relief à ses réponses précédentes.

L’objet dont tu te sers le plus en voyage?

J’ai toujours un immense foulard avec moi. C’est fou tout ce que tu peux faire avec ça. Tu peux te protéger du soleil, t’envelopper lors des voyages en train ou en avion. C’est aussi très utile lorsque tu es une femme et que tu voyages dans des pays plus conservateurs au niveau de l’habillement. Ce que tu peux montrer est très différent d’un pays à l’autre.

L’objet dont tu ne te sers jamais mais que tu apportes toujours quand même?

Je n’en ai pas. Comme je fais souvent mes bagages, je sais ce dont je vais me servir.

L’objet qui n’existe pas encore mais que tu aimerais inventer pour faciliter les voyages?

Un sac apesanteur. Même si j’essaie de partir avec un petit sac, j’adore acheter des souvenirs et parfois je dois me limiter à cause du poids.

Le souvenir le plus ridicule que tu as acheté en voyage?

J’achète surtout des vêtements et des bijoux en voyage. Je les reporte ensuite avec plaisir. Sauf qu’en Inde pour chaque évènement important, tu dois porter un sari neuf. J’en ai donc possédé plusieurs. J’ai donné beaucoup de vêtements mais je suis tout de même revenue avec 4 saris. C’est un peu ridicule étant donné que je suis incapable de les revêtir seule.

L’aliment, boisson ou mets que tu aimes comparer d’un pays à l’autre?

Je ne fais pas ça. Je ne suis pas attachée à un type de nourriture. Je mange très local. Et la nourriture est tellement différente d’un endroit à l’autre. Je mange ce qui est bon à l’endroit où je me trouve.

Le groupe ou musicien-ne que tu préfères écouter en voyage?

Mes choix varient selon le voyage. Je choisis la musique en fonction de ce que j’ai besoin à un moment précis. Et c’est super varié. J’essaie de faire des découvertes de musiques locales et ça devient la trame sonore de mon voyage. La musique me permet aussi de stimuler certaines émotions. En Inde, j’écoutais souvent de la musique super rythmée pour me donner l’énergie de traverser les foules. En Afrique, j’écoutais beaucoup de musique acoustique africaine. J’avais alors vraiment l’impression d’être dans un film.

Des découvertes artistiques que tu as faites durant tes périples que tu aimerais partager avec les lecteurs (peinture, musique, littérature, etc.)?

J’ai beaucoup aimé 3 livres que j’ai découverts en Inde:

Holy Cow! An Indian Adventure, Sarah Macdonald;
Shantaram, Gregory David Roberts;
The God of Small Things, Arundhati Roy.

J’ai aussi beaucoup aimé Le portail – prisonniers des Khmers rouges de François Bizot.

Au niveau musical, j’adore la série Putumayo qu’on trouve au Québec et qui se spécialise dans la musique du monde. Ça m’a permis de faire plein de belles découvertes. Je pars souvent avec l’album thématique d’un pays ou d’un style et ça me donne un point de départ. Aussi, je demande souvent aux gens que je rencontre de me faire des CD de la musique qu’ils aiment.

Claudine à Jodhpur, en Inde (photo prise par Lokesh Moorthy)

Claudine à Jodhpur, en Inde (photo prise par Lokesh Moorthy)

La superstition dont tu ne peux te débarrasser en voyage, si incongrue soit-elle?

Il m’est difficile d’être seule dans un lieu où il y a eu beaucoup de violence: salle de torture, prisons, etc. Ce que je ressens est trop intense.

Le pays que tu as préféré et pourquoi?

C’est difficile. Moi c’est la terre au complet que j’aime. Mais j’ai un attachement particulier à l’Inde à cause de son intensité et du fait que j’y suis restée près de 2 ans. J’y ai tant de souvenir.

J’ai aussi beaucoup aimé le Bénin pour ses rituels, son histoire, sa nature sauvage.

Le pays que tu as le moins aimé et pourquoi?

Je ne peux pas faire un choix comme ça. J’ai un ami qui est né entre plusieurs cultures et qui m’a donné un excellent conseil. Il m’a dit que quand tu rencontres quelqu’un d’une autre culture tu lui parles de ce que tu aimes ou ce qui a l’air intéressant de sa culture. Il y a toujours quelque chose de positif. C’est ce que je m’efforce de faire partout.

Ton plus beau souvenir de voyage?

Au Bénin, je travaillais pour une mission médicale et nous avions voyagé toute la journée dans une minifourgonnette. Nous nous rendions dans un village à la frontière nord du Bénin. La nuit est tombée et il faisait complètement noir. Il n’y avait pas d’électricité. Lorsque nous sommes arrivés plusieurs tambours se sont mis à résonner et nous avons réalisé que les gens du village nous attendaient dans la noirceur. Ils ont allumé des feux, les tambours se sont mis à résonner encore plus fort et plusieurs personnes se sont mises à danser. Les autres ont formés un cercle autour des musiciens et danseurs. Il y avait un genre de sorcier au centre. Je me souviens qu’il était entouré de fumée. J’étais tellement fascinée. Je me suis avancée et placée dans le cercle. Ensuite, le sorcier s’est avancé vers moi et m’a pris par les mains pour que je vienne danser avec eux. C’était complètement enivrant: la chaleur, la musique et surtout leur façon de danser. Tout ça m’envoûtait. Et je suis restée longtemps à danser comme ça avec eux.

L’expérience de voyage que tu ne souhaites jamais revivre?

C’est la maladie. J’ai attrapé le chikungunya en Inde. Cette maladie donne de fortes fièvres et des douleurs de type arthritique. J’ai dû garder le lit un mois.

Un secret de voyage que tu n’as jamais révélé… jusqu’à maintenant?

Je suis allée rejoindre un ami à Kigali. Seulement, ce dernier devait arriver seulement le lendemain de mon arrivée. Il m’avait donc réservé une chambre à l’hôtel en me disant qu’un chauffeur viendrait à l’aéroport puisque mon avion arrivait après minuit. Lorsque je suis arrivée à l’aéroport, le chauffeur m’attendait avec une affiche avec mon nom et Hôtel des Mille Collines écrit sur une affiche. C’est l’hôtel du film Hôtel Rwanda (2004) où on a hébergé plein de gens pendant le génocide. Ça je l’ai raconté à des amis. Mais ce que je n’ai pas dit c’est que ce lieu m’a tellement impressionnée que je n’ai pas dormi de la nuit. Je me promenais dans l’hôtel, complètement habitée par ce qui s’y était passé. J’ai aussi conservé l’affiche du chauffeur.

Et c’est ainsi que se termine une intense entrevue, colorée par la personnalité de Claudine. Je la remercie d’avoir donné des réponses aussi profondes, aussi personnelles. J’espère qu’elle vous a aidés à mieux comprendre certains phénomènes liés au voyage, comme le choc du retour. Claudine, je te souhaite bonne chance dans tous tes projets. Au plaisir de partager à nouveau une bière ou un café avec toi, peu importe où, peu importe quand.

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