Mes observations générales sur l’Ouzbékistan (2e partie)

Char Minor, à Boukhara

Char Minor, à Boukhara

Deuxième et dernière partie de mon billet sur mes observations générales à propos de l’Ouzbékistan. À plus de 4100 mots pour les deux parties, j’estime avoir touché quelques-uns des aspects les plus importants d’un voyage dans le pays. Pour le reste, lisez le Lonely Planet sur l’Asie centrale ou, encore mieux, allez voir par vous-mêmes. Vous ne le regretterez pas.

Produits de première nécessité

– Les bazars ont de tout pour tous les besoins (ou presque; je n’y ai pas vu de jouets sexuels). J’ai même acheté du dentifrice à saveur de miel. Fait changement de la menthe. Sinon, de petits commerces de quartier proposent les divers items qui pourraient vous manquer. Je n’ai par ailleurs vu qu’un seul magasin de type « grande surface » (et encore, pas si grande surface que ça: on parle ici d’une pharmacie Jean Coutu de taille moyenne), à Samarcande, juste à côté de la place du Régistan.

Bazar Siyob, à Samarcande

Bazar Siyob, à Samarcande

Sinon, pour les besoins plus pointus, un centre commercial de type « occidental » se trouve dans le centre de Tachkent, entre le square Amir Temur et la place de l’Indépendance. Je crois même y avoir vu de la lingerie.

Santé

– J’ai déjà mentionné l’eau potable dans le billet précédent, mais un bon thé chaud ne peut jamais faire de mal. Gâtez-vous.

Du bon thé...

Du bon thé…

– Je n’ai pas eu à recevoir de vaccins particuliers pour aller en Ouzbékistan.

– Je n’ai aucune idée de la qualité des soins de santé dans le pays, car je n’ai pas été malade, je n’ai pas été impliqué dans un accident.

– En outre, une pharmacie de Tachkent vend des sangsues vivantes pour une bonne vieille saignée, façon Renaissance.

Des sangsues vivantes

Des sangsues vivantes en vente libre

– Qui dit saisons bien définies dit possibilité d’attraper rhume, grippe et autres cochonneries saisonnières. Prévoir les vêtements appropriés selon le moment de l’année.

Sécurité

– Je ne me suis jamais senti en danger lors de mon séjour en Ouzbékistan. Bon, je suis un homme, alors je ne peux me prononcer sur le fait de voyager en tant que femme. Ceci dit, j’ai senti la bienveillance des gens, malgré la barrière de la langue. J’ai perçu une sincère curiosité chez certains, comme au bazar de Chorsu à Tachkent; on m’a demandé d’où je venais avec un enthousiasme réconfortant. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de risques, je ne crois pas au « risque zéro », peu importe le pays, mais, selon mon expérience de touriste occidental riche, l’Ouzbékistan est aussi dangereux qu’un grand-père se déplaçant en marchette.

Khiva, le soir

Khiva, le soir

– Il faut dire aussi que, dans la plupart des villes, l’ambiance devient léthargique, une fois la nuit tombée. Il existe quelques clubs, notamment à Boukhara, mais j’ai l’impression qu’ils visent surtout une clientèle touristique. Je me doute que de discrets bars locaux accueillent les fêtards ouzbeks (et principalement des hommes, sans doute), selon un rituel conçu pour ne pas éveiller les soupçons de mauvaise conduite. Mais sans contact, il m’a paru difficile de découvrir leur emplacement. Bref, l’Ouzbékistan n’est pas la Thaïlande, au plan festif. Ce qui n’est pas une mauvaise chose.

Club de Boukhara

Club de Boukhara

– Aussi, j’ai remarqué que les changeurs de devises circulaient avec des sacs en plastique remplis de billets dans les lieux publics, comme aux alentours de la gare de Tachkent. Essayez ça à, disons, Caracas, juste pour voir. Ça en dit long sur le degré de sécurité du lieu.

Transports

– Le circuit touristique classique consiste en une boucle Tachkent-Khiva/Urgench-Boukhara-Samarcande (ou vice-versa), avec de possibles détours, comme la vallée de Ferghana ou la région de Nukus (pour le cimetière de bateaux de la mer d’Aral du Sud). Ce circuit s’effectue aisément en deux semaines ou moins sans se presser, mais si vous ajoutez d’autres destinations, je dirais qu’un minimum de trois semaines vous permettrait de tirer le maximum de chaque endroit. Le tout en respectant les conditions de votre visa, bien sûr.

Bus dans la région d'Urgench

Bus à Khiva

– Le train constitue le moyen de transport de prédilection en Ouzbékistan: billets pas cher, horaires réguliers, service – généralement – efficace. Pour obtenir des billets, ayez votre passeport avec vous, que vous les achetiez dans une agence ou à la gare. De mon côté, je suis passé par une agence de Boukhara. Il serait préférable de les acheter au moins une journée à l’avance, si vous tenez à respecter un plan précis. Vérifiez aussi s’il y a une fête ou une date importante, afin d’anticiper l’achalandage potentiel. Notez que les trains comptent plusieurs classes et que les prix des billets varient en fonction de celles-ci. Honnêtement, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de payer davantage pour un billet en classe supérieure: les trajets sont courts, à peine quelques heures entre chaque ville, alors le confort n’est pas aussi primordial que si vous effectuiez un trajet de quatorze heures dans un wagon surbondé. Les trains sont en outre vieillots, mais charmants. C’est comme voyager en 1981. Plutôt ponctuels, ils franchissent les courtes distances sans encombre et vous permettent de voir du pays.

Gare de Tachkent

Gare de Tachkent

– En plus, vous aurez la chance de regarder des vidéoclips d’artistes du coin et ainsi découvrir ce qui fait vibrer la jeunesse d’aujourd’hui. J’adore regarder les clips d’artistes de divers pays, d’abord pour entendre des langues que je ne connais pas, mais surtout pour constater que le thème des relations amoureuses hommes-femmes est universel, peu importe le degré de qualité de la musique.

https://www.youtube.com/watch?v=cgJSqbioRRk

– Des bus circulent sur les routes du pays, mais ils paraissent moins populaires que les trains, sauf pour de courtes distances. Ainsi, à côté de la gare de Tachkent se trouve un terminus de minibus. J’ai bien aperçu quelques bus interurbains entre Khiva et Boukhara, mais j’ai vu plus de camions et de taxis sur cette route.

Bus dans la région d'Urgench

Bus dans la région d’Urgench

– On conduit à droite, ici. Et on conduit comme si la fin du monde déferlait sur la planète. Sérieux, j’ai été surpris par la témérité de plusieurs automobilistes, surtout à Tachkent. Traverser la rue comportait parfois son lot de risques non négligeables.

En plus, certaines voitures n'allument même pas leurs phares...

En plus, certaines voitures à Tachkent n’allument même pas leurs phares…

– Les taxis partagés se veulent aussi une bonne option. Le prix de la course est négocié avant le départ. Par exemple, pour le trajet Khiva-Boukhara, trois voyageurs et moi avons payé 80 000 soms chacun (environ 28,99 $ CAN, aux taux officiel en vigueur au moment de la publication de ce billet) pour environ six heures de route (plus les pauses; environ huit heures en tout). Direct, rapide, ce moyen offre également la possibilité d’effectuer des arrêts sur demande. Notre chauffeur ne parlait pas anglais, mais j’ai senti sa bonté; on a dîné avec lui, dans un restaurant perdu sur cette route désertique, et il nous a préparé le thé selon la méthode traditionnelle (verser du thé dans une coupe, reverser le thé dans la théière; répéter deux fois et boire). Il nous a même montré la frontière entre l’Ouzbékistan et le Turkménistan, sans qu’on ne lui demande.

Dans le taxi vers Boukhara...

Dans le taxi vers Boukhara…

– Par ailleurs, comme je l’ai mentionné dans mon billet sur Tachkent, la notion de taxi possède ici une élasticité digne de la pâte Play-Doh. Dans la capitale, n’importe quel véhicule peut devenir un taxi. Il suffit de héler les voitures qui passent et elles s’arrêteront. Une après l’autre. Le prix est ensuite négocié, selon la distance, la durée prévue, etc. La barrière de langues peut jouer des tours, mais avec un peu de patience, je suis convaincu qu’il est possible de s’entendre quand même.

Le passager se demande sans doute si je cherche un taxi...

Le passager se demande sans doute si je cherche un taxi…

– Toujours à Tachkent, prendre le métro constitue une expérience en soi. Chacune des stations ressemble à une mini-cathédrale, mais la photographie y est interdite. La règle serait appliquée avec zèle par les gardiens, alors je ne recommande pas de la transgresser. Il faut aussi présenter une pièce d’identité à l’entrée de chaque station; j’avais une photocopie couleurs de mon passeport et elle était acceptée. Les rapports avec les gardiens étaient cordiaux. C’était même amusant de voir l’expression étonnée de certains d’entre eux quand ils constataient que je venais du Canada. Du genre « mais qu’est-ce qu’il fout ici, celui-là? ».

Puisque je n'ai pas pris de photos dans le métro, voici une photo du quartier autour de mon auberge.

Puisque je n’ai pu prendre de photos dans le métro de Tachkent, voici une photo du quartier autour de mon auberge.

– Pour les plus pressé-es, l’avion permet de relier les principales villes du pays, d’autant plus que nombre d’entre elles ne sont pas connectées par des routes directes, comme Tachkent et Khiva. Uzbekistan Airways, la compagnie nationale, domine les cieux ouzbeks. J’ai essayé, sans succès, d’acheter un billet directement sur le site de la compagnie. J’ai alors demandé à l’agence de voyages Advantour de le faire pour moi. Mon stratagème a fonctionné. À noter que Khiva n’a pas d’aéroport; le plus proche se trouve à Urgench, à environ 40 minutes de taxi.

Départ pour Urgench

Départ pour Urgench depuis Tachkent

– Enfin, l’Asie centrale attire les cyclistes. J’avoue ne pas comprendre l’intérêt de pédaler dans une région souvent désertique ponctuée de steppes et de montagnes, mais bon, en même temps, je ne comprends pas non plus l’intérêt des mélomanes pour le groupe Oasis. Enfin. L’Ouzbékistan n’échappe pas aux cyclistes motivés: Boukhara, de par sa proximité avec la frontière turkmène, et Tachkent, de par sa collection d’ambassades, semblent les arrêts les plus populaires auprès de ses passionné-es de vélo. Si vous choisissez cette option et si vous passez par le Turkménistan, préparez vos jambes, car les probabilités de ne recevoir qu’un visa de transit de cinq jours sont élevées. Et, selon les témoignages que j’ai recueillis, cinq jours, c’est bien peu pour couvrir une telle distance.

Trucs oubliés

Dans la première partie de ce billet, j’ai oublié de mentionner quelques trucs. Les voici.

– Le décalage horaire entre le Québec et l’Ouzbékistan est de neuf heures.

– Je n’ai pas acheté de carte SIM pour mon téléphone, parce que je n’en avais pas besoin. Je ne pourrais donc vous parler en détails du réseau de téléphonie cellulaire ouzbek, mais, à ma connaissance, les opérateurs majeurs sont Ucell et Beeline. Il semblerait toutefois que, depuis 2013, seuls les citoyens ouzbeks peuvent acheter des cartes SIM. Si c’est encore le cas, faites-vous des amis du pays et demandez-leur ce service.

– Malgré le fait que l’immense majorité de sa population soit musulmane, l’Ouzbékistan produit du vin. Et c’est même une fierté nationale. Un vin sucré, tant le rouge que le blanc, qui accompagne à merveille les célébrations d’anniversaire à Samarcande ou Tachkent.

Bouteille de blanc

Bouteille de blanc

– J’ai été témoin de plusieurs pannes d’électricité à Samarcande, tant durant le jour qu’en soirée. Pas l’idéal pour un blogueur.

– L’Ouzbékistan a malheureusement un bilan désastreux, en matière de respect des droits humains (pour les journalistes, notamment). Si ce genre de situation vous préoccupe, vous devez en tenir compte dans votre décision d’aller en Ouzbékistan ou non. Laurent, du blogue One Chai, a abordé cette question complexe dans cet article. Personnellement, je n’ai eu que de bons contacts avec les habitant-es, alors j’imagine que les exactions visent les citoyen-nes qui dévient des règles imposées par le pouvoir. Le président Islam Karimov a régné sans concession du 24 mars 1990 jusqu’à sa mort, le 2 septembre 2016; son dauphin Chavkat Miromonovitch Mirziyoyev a pris la relève dès le 8 septembre 2016. Bref, selon moi, la meilleure réponse dans ce dilemme est celle qui correspond le plus à vos valeurs.

Des prix et des excursions

– Lors de mon séjour à Samarcande, j’ai visité l’office de tourisme, situé sur l’allée piétonnière/rue Toshkent, tout près de la mosquée Bibi-Khanym. J’ai alors pu connaître les prix officiels, en date d’octobre 2016, pour de nombreuses excursions, pour les billets de train et de bus et pour les taxis. J’ai photographié ces documents, parce que j’ai pensé que ces renseignements pourraient vous intéresser. Eh oui, lectrices et lecteurs, je pense parfois à vous. J’avais d’abord voulu créer un beau tableau avec toutes les infos, mais j’ai constaté qu’elles formaient une masse inextricable de chiffres. J’ai donc choisi de publier mes photos telles quelles. Les voici:

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La fin

C’est ce qui conclut ma série de billets sur l’Ouzbékistan, un pays que j’ai beaucoup aimé et que je recommande. J’ai pris mon temps pour les écrire. Vraiment. J’ai terminé cette série presque six mois après avoir été là-bas. J’ai totalement pressé le citron, comme on dit. Et je l’assume. J’ai pris l’an dernier la décision de ralentir le rythme de publication, de mettre davantage d’efforts dans la rédaction, de choisir des sujets plus personnels (ou du moins, traités d’un angle plus personnel). Je compte donc suivre cette voie pour mes prochains billets, peu importe le sujet que j’aborderai. Ceci dit, la grande question: quelle sera ma prochaine destination? À suivre…

4 thoughts on “Mes observations générales sur l’Ouzbékistan (2e partie)

  1. Laurent

    Merci pour la référence Stéphane. Moi aussi, tous les chauffeurs de taxis collectifs à qui j’ai eu à faire étaient adorables, ainsi que les autres passagers d’ailleurs.
    Pour les cyclistes, je pense que la plupart de viennent pas juste pour faire du vélo en Ouzbékistan, car comme tu le dis, ça ne semble pas passionnant au vu des paysages. La plupart viennent d’Europe à vélo en direction de la Chine, et l’Ouzbékistan est sur leur route, avant d’aller au Kirghizstan et au Tadjikistan, destinations bien plus intéressantes à vélo, même si ça nécessite quelques efforts à la vue de la topologie de ces pays !
    Niveau autoritarisme du régime, les choses semblent lentement s’améliorer avec le nouveau président, ce que peu de monde attendait. C’est encore loin du rêve, mais tout progrès en la matière est toujours bon à prendre.

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    1. Stéphane Pageau Post author

      Y a pas de quoi, Laurent! Autant j’aime faire du vélo, autant je ne me vois pas entreprendre un long voyage de cette façon. Mais bon, l’aventure doit être inoubliable. Et, en effet, tout progrès est bon à prendre, alors on ne peut que souhaiter que les choses s’améliorent encore et encore pour les Ouzbeks.

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