Santa Clara, le Che et sa bombilla

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Mémorial du Che

Tout le monde – sauf, disons, Ozzy Osbourne – connaît le Che. Son visage a été immortalisé par la légendaire photo Guerrillero Heróico d’Alberto Korda. Prise le 5 mars 1960 à La Havane, lors de l’enterrement des victimes de l’explosion de la Coubre, cette photo a marqué tant les t-shirts que les affiches que les esprits. Mais il y a plus au Che qu’un visage célèbre. Beaucoup plus. Ce billet ne se veut toutefois pas une biographie exhaustive de Guevara, plusieurs existent déjà, et je n’ai pas l’intention de me poser en historien. Je vais simplement relater mon expérience au mausolée d’une figure importante du XXe siècle.

Une vie, une mort

Né à Rosario, en Argentine, le 14 juin 1928, Ernesto Rafael « Che » Guevara a connu une vie mouvementée (euphémisme assumé). Assassiné à La Higuera, en Bolivie, le 9 octobre 1967 (par des soldats apparemment entraînés/soutenus par la CIA), le Che possède l’envergure d’un saint à Cuba et dans de nombreuses régions de l’Amérique latine, entre autres. Une véritable icône révolutionnaire marxiste, malgré des controverses entre historiens et journalistes sur les interprétations de son héritage politique. Les restes du Che ont été découverts dans une fosse commune à Vallegrande, en Bolivie, en 1997. Sa dépouille a ensuite été transportée de la Bolivie à Cuba, où elle a fait l’objet d’une cérémonie avec honneurs militaires, le 17 octobre 1997. Mais pourquoi Santa Clara et non La Havane? Parce que c’est à Santa Clara qu’un des épisodes décisifs de la Révolution s’est déroulé, soit l’attaque de trains de ravitaillement du régime Batista et la prise subséquente de la ville, en décembre 1958. La symbolique liée à la victoire de Santa Clara – à laquelle le Che a largement contribué – aurait été l’argument déterminant dans le choix de l’emplacement du monument. En outre, des panneaux faisant l’éloge du Che et de la Révolution – d’aucuns qualifieraient cet éloge de propagande – décorent le paysage urbain, ici.

Propagande au Parque Vidal

Les 3 M: mausolée, mémorial et musée

En fait, le mausolée fait partie d’un complexe, avec un mémorial et un musée. La construction du complexe a débuté en 1982 et s’est terminée en 1988. Entre 1997 et 2009, plus de 3 millions de personnes provenant de plus de 100 pays auraient visité le site. On y accède par la Calle Campo de Tiro. Pas de prix d’entrée au MMM (Mausolée, Mémorial, Musée), selon mon expérience. En tout cas, s’il y en a un, je ne l’ai pas payé. Il faut cependant payer pour confier ses sacs à un vestiaire (0,50 CUC, soit, 0,61 $ CAN, si je ne m’abuse) et il est obligatoire de les laisser là-bas, de même que les appareils photos, caméras, téléphones intelligents. Et des surveillantes s’assurent que les visiteurs respectent les règles. En gros: PAS DE PHOTO, PAS DE VIDÉO. Attitude respectueuse exigée. Donc, pas de conversation bruyante, pas de cris de joie, pas d’appel à la révolution, rien. Ces règles ne s’appliquent toutefois pas au mémorial lui-même, puisqu’il se trouve en plein air. Malgré ces contraintes, j’ai apprécié mon expérience au MMM: l’histoire des luttes révolutionnaires en Amérique latine au XXe siècle est longue, labyrinthique et le Che en fut un personnage de premier plan. À un point tel que l’influence de celui-ci se fait sentir encore aujourd’hui, même dans des sphères inattendues, comme dans les paroles de groupes hardcore/punk/crust/grind à la Capitalist Casualties.

J’y suis presque…

Ce que l’on voit en premier, en arrivant sur le site, c’est le mémorial, avec la statue en bronze du Che trônant en son centre, sur une colonne. Pose héroïque, béret en place, bras en écharpe, la statue du héros dégage une indéniable majesté, du haut de ses 6,7 mètres (piédestal inclus). Elle est par ailleurs tournée vers l’Amérique du Sud, afin de souligner les liens entre les peuples opprimés de cette région du monde et les luttes émancipatrices menées par Guevara et ses camarades. D’autres éléments du mémorial portent des inscriptions et gravures moussant la gloire de la Révolution. J’ai été au complexe en début d’après-midi et la lumière du soleil brillait alors d’un éclat vif, pur, cru. C’est difficile à expliquer, mais les photos rendent un peu cette impression. Une aura de sainteté? Des gens pourraient y croire. Pas moi. Je m’y connais trop mal, en matière de sainteté.

Cette lumière…

On entre ensuite dans le mausolée/musée par la même porte, via un escalier situé derrière la statue du Che. À droite, le musée; à gauche, le mausolée. Le musée présente l’histoire du révolutionnaire, à travers divers objets lui ayant appartenu ou ayant trait à sa vie: des lettres, des photos, des armes, des vêtements, mais surtout, sa calebasse et sa bombilla. J’aurais tant aimé vous les montrer… ces objets banals rappellent que le Che est né en Argentine et que, comme bon nombre d’Argentin-es, il avait un penchant pour le maté. Je peux le comprendre.

Le mémorial, vu de derrière, et l’entrée du mausolée/musée

Côté mausolée, on remarque en entrant qu’une flamme éternelle – allumée par Fidel Castro – brûle dans un coin. Elle rend hommage à la vie du Che, de même qu’à celles de 29 de ses camarades tués eux aussi en Bolivie. D’ailleurs, 29 plaques en leur honneur ont également été posées dans ce sanctuaire. Ici, encore plus que dans le musée, le silence et le recueillement sont au rendez-vous. Sous l’oeil sévère de surveillantes, bien sûr.

Fidel, compagnon d’armes du Che…

On peut aussi se promener dans un genre de cimetière où ont été posées des plaques commémoratives (des cénotaphes?) honorant la mémoire de combattant-es de la Révolution. Du moins, c’est mon interprétation. Les lieux gagneraient en intérêt à offrir aux visiteurs davantage de panneaux explicatifs. Ceci dit, chaque plaque porte le nom et les années de naissance et de mort d’un homme ou une femme ayant donné sa vie pour la cause. Ambiance solennelle, comme il se doit.

J’aurais dû acheter ce t-shirt, quand j’en ai eu l’occasion. Un manque de jugement de ma part.

Une boutique de souvenirs permet de faire le plein d’objets à l’effigie du Che ou inspirés par lui. On y trouve des livres en quantité, entre autres. Je ne me souviens pas d’y avoir vu des t-shirts, par contre. Ils ne sont sans doute disponibles que dans les pays où ils peuvent aider les jeunes marginaux à démontrer leur ardeur révolutionnaire auprès de leurs « camarades ». Tout de même paradoxal qu’une icône anticapitaliste soit ainsi récupérée par le capitalisme. Enfin. Pour ma part, j’ai opté pour des cartes postales à 0,90 CUC (environ 1,10 $ CAN) chacune, parce qu’on n’est jamais déçus, avec des cartes postales.

Populaire et pas que sur des t-shirts

Alors voilà. Santa Clara et le mausolée du Che. Certains y vont par affinité idéologique, d’autres, par intérêt historique. Peu importe la raison, cette visite est difficile à éviter, lors d’un passage dans la ville. Et, bien franchement, ce serait dommage de s’en priver.

Prochaine destination: la jolie Trinidad.

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