13 questions sérieuses à Delphine

Delphine à Buff Bay, Jamaïque (photo prise par Dominic Ali)

Pour plusieurs, la coopération internationale constitue la meilleure façon de voyager, car non seulement elle permet au participant-e de découvrir un pays, une région, mais elle lui offre en plus la possibilité de vivre des expériences qui seraient hors d’atteinte au simple touriste, dans bien des cas. Or mon amie Delphine Melanson a eu le plaisir de prendre part à d’importants projets de coopération internationale dans quatre pays, sur deux continents. J’ai donc naturellement pensé à elle quand est venu le moment de préparer une entrevue sur ce thème. À ma grande joie (et à la vôtre), elle a accepté de répondre à mes questions sur le sujet, réponses que je vous invite à lire. Vous pouvez également lire ses blogues, Delphine en Jamaïque!!!! et Nomadsland, pour en apprendre plus sur ses expériences.

Comment définis-tu la coopération internationale?

Coopérer signifie travailler avec, donc la coopération internationale c’est le fait de transférer des connaissances et ressources pour faire de ce monde un lieu plus équitable pour tous.

C’est ausi un moyen de joindre l’utile à l’agréable, et ma façon à moi de me réaliser pleinement sur le plan professionnel.

Quelles différences vois-tu entre un stage de coopération internationale et tout autre type de voyage?

Pour moi la plus grande différence entre un stage de coopération international et un voyage est l’intention et les valeurs de la personne qui part en coopération. Un stage de coopération internationale implique des valeurs humanistes de partage, solidarité, empathie, compassion, ainsi qu’un engagement concret dans la communauté d’accueil (de plus ou moins longue durée), le désir de partager son temps, ses connaissances, donner de soi sans rien espérer en retour, une ouverture d’esprit et vers l’autre et l’acceptation des différences de l’autre, qui n’est jamais autre bien longtemps.

Selon toi, quelles qualités sont essentielles pour pleinement vivre ce genre d’expérience?

La première qualité que je vois est la résilience, afin de savoir s’adapter à tout genre d’événements et accepter les imprévus, parce qu’il y en aura tout le temps. La patience est également très importante. Apprendre à utiliser les temps morts efficacement (lire, écrire, réfléchir, méditer), à penser stratégiquement aux possibles résultats de nos actions. J’ai nommé d’autres qualités importantes dans la réponse précédente, à savoir l’ouverture d’esprit, le non-jugement, l’acceptation de l’autre, le lacher-prise, la flexibilité. Ces qualités font partie d’un style de vie propre aux coopérants aguerris, bohèmes voyageurs au long cours.

Comment choisir un bon organisme de coopération internationale?

Tout d’abord, il est bon de s’analyser soi-même afin de bien savoir ce qu’on recherche. Quels sont mes besoins? Combien de temps est-ce que je suis prêt/e à partir? Où? Quelle sont mes motivations à partir en coopération internationale (oubliez sauver le monde).

Après avoir analysé ses besoins, je suggère de 1) prendre rendez-vous avec le ou la représentenant/e de l’organisme ou quelqu’un en mesure de répondre à nos questions (conseiller aux volontaires, ressources humaines); 2) se rendre à l’organisme en personne et poser des questions à cette personne, de facon ouverte et décontractée, telles que: depuis combien de temps l’organisme est-il en opération? Quelles sont ces valeurs? Sa mission? Ses valeurs/mission ont-elles changé depuis sa fondation? Si oui, comment? Quel est son objectif principal? Avec quel genre de population travaille-t-il? Quel genre de programme offre-t-il (durée, rémunération, emplacement, couverture médicale)? Quels sont ses plus grands succès, ce qui fait sa notoriété. Ces questions sont utilisées à titre d’exemples, sentez-vous libre de les adapter et de les personnaliser à votre guise.

Dans un deuxième temps, il est bien de s’interroger sur ses intentions / motivations personnelles à joindre cet organisme. Est-ce que les valeurs, la mission, les populations visées, me correspondent, m’appellent, m’émeuvent? Comment s’est passé le contact en personne lors de ma visite? Est-ce que je sens que la personne a répondu à toutes mes questions?

Quels sont les impacts réels d’un projet de coopération internationale pour la communauté d’accueil?

Les impacts peuvent être à différent niveaux. Les deux principaux types d’impacts sont économiques et sociaux. Les impacts économiques sont par exemple une progression de l’économie locale, car les coopérants doivent consommer, donc stimulent l’économie. Si c’est un groupe de coopérants qui se rend dans un village, il y aura nécessairement un impact social, surtout si la couleur de leur peau, leur langue maternelle ou leur accent sont différents de ceux des locaux (et ce sera probablement le cas).

Les années 1960 virent la naisance de la coopération internationale avec les premiers gros projets de construction d’infrasctrutures, comme des routes, ponts ou des puits. Dans ces projets, l’impact est fort visible, il s’agit de l’infrastructure qui a été bâtie durant le projet.

Que répondrais-tu aux gens qui disent que la coopération internationale bénéficie davantage aux coopérants qu’à la communauté d’accueil?

Je leur dirais qu’ils ont tort et raison en même temps. Quant à moi la coopération bénéficie autant aux coopérants qu’à la communauté d’accueil. Plus on donne et plus on recoit.

Comment as-tu découvert la coopération internationale?

Wow, tu parles d’une bonne question!! Ça fait un bail, je te le garantis! J’etais en Italie en 2000 et j’ai su que des groupes de missionnaires partaient pour aider les pauvres en Afrique. Je n’étais pas intéressée à partir sous l’égide de l’église mais savoir que de tels projets existaient a stimulé mon intérêt pour partir faire de la coopération en Afrique 9 ans plus tard.

J’ai effectué mon premier stage de coopération internationale en 2004 quand je suis partie enseigner le francais et l’anglais en Équateur pour 3 mois, j’habitais dans une famille d’accueil. L’expérience d’immersion culturelle dans une culture et une langue complètement différentes de la mienne m’a donné envie de recommencer, et j’en suis aujourhui à mon quatrième mandat de coopérante volontaire.

Qu’est-ce que tu en aimes le plus et qu’est-ce que tu en aimes moins?

Le plus: le dépaysement, le choc culturel, vivre à l’etranger, m’adapter à une nouvelle culture, n’importe où.

Le moins: les adieux inévitables aux gens que j’aime, les départs de mes amis volontaires qui sont autant de petites morts.

Quelle a été ta plus belle expérience de coopération volontaire et pourquoi elle le fut autant?

Sans nul doute ce fut mon expérience au Brésil, entre 2007 et 2008, lorsque j’ai effectué un stage de coopération internationale avec l’organisme Alternatives et le programme Cyberjeunes. J’avais déjà séjourné au Brésil l’année précédente lors d’un échange étudiant, mais ce stage a été l’occasion pour moi de découvrir et de vivre avec le peuple brésilien. J’ai adoré la culture brésilienne, l’accueil si chaleureux de tout un chacun même quand ils me connaissaient à peine, les amis rapidement rencontrés, les voyages à l’intérieur du pays (et Dieu sait qu’il y en a à découvrir). C’est définitivement un pays où je vivrais à long terme.

Quelles leçons as-tu tirées de toutes tes expériences?

Qu’il est bon de savoir compter sur soi-même, que parfois je dois apprendre à qui faire confiance mais surtout à qui ne pas faire confiance. Que partout où j’irai il y aura toujours des gens pour m’aider, me démontrer leur amitié et partager un brin d’humanité avec moi.

Comment ta vision de la coopération internationale a changé avec les années, avec tes expériences?

Je suis toujours dans la coopération internationale pour les mêmes raisons que quand j’ai commencé, me réaliser comme personnne, me sentir utile tout en contribuant à faire de ce monde un lieu plus équitable pour tous ses habitants. Peut-être est-ce le fait de voir la pauvreté et de réaliser mon impuissance à cet égard qui me rend un peu moins optimiste que les choses changent et que l’écart entre les riches et les pauvres cesse de s’agrandir.

Que dirais-tu à une personne qui souhaite découvrir cet univers mais qui, pour diverses raisons, hésite à se lancer?

Je lui dirais de plonger, de vivre selon ses rêves, de ne pas se laisser arrêter par ses peurs. Je lui dirais que le sacrifice de laisser son confort matériel des pays industrialisés en vaut la peine, et que l’expérience est autant humaine que spirituelle.

Quels sont tes projets?

Ca dépend, c’est une question vague. A court, moyen ou long terme? J’ai toujours des projets tu sais. Pour l’instant à court terme rentrer au Québec et passer du temps de qualité avec ma famille et mes amis que je n’ai pas vus depuis trop longtemps. Après on verra.

La suite de cette entrevue sera publiée ce jeudi.

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