Rio de Janeiro: premiers pas au coeur de la bête (1ere partie)

Édifices dans le centre de Rio. À droite, le déroutant siège social de Petrobras.

Après le billet sur mon arrivée à Rio de Janeiro, j’en suis maintenant rendu à décrire mes péripéties dans cette ville. J’ai effectué deux séjours à Rio, soit du 4 au 9 septembre, puis du 14 au 18 septembre. Je vais donc diviser mon texte en deux, afin de couvrir chaque période. Voici le compte rendu de mon premier séjour.

Premières impressions

Mes premiers jours en sol brésilien ont été marqués par une température merdique: pluie, froid, nuages, vent et rares pointes de soleil… conséquence des feux en Amazonie? Il faudrait demander à Yannick Marjot. J’ai croisé beaucoup de gens avec des manteaux ou des chandails à manches longues. Pour ma part, je supportais sans peine cette fraîcheur. Le résultat de mon héritage nordique. Mais je comprends que, quand on vit dans un milieu où la température annuelle moyenne tourne autour de 23 °C, une chute de quelques degrés suffit à ébranler l’épiderme. J’espérais tout de même que la météo allait s’améliorer, car je voulais visiter quelques attractions extérieures sans craindre les précipitations. Mon souhait a été exaucé, mais seulement vers la fin de mon séjour. J’y reviendrai.

Il fait frais, mais rien n’arrête le volleyball de plage.

Malgré la médiocre météo, je me suis promené. Et la chose qui m’a aussitôt frappé: les édifices sont construits en hauteur, afin d’épouser les reliefs montagneux de la ville. Cette caractéristique se retrouve dans plusieurs quartiers. Quand je marchais dans certaines rues, je me sentais petit. Avalé par le vertige des bâtiments. J’ai adoré cette sensation, elle contribue au charme de Rio. Mais je ne crois pas que je pourrais vivre dans une tour de huit étages.

De la hauteur et du vertige.

Le centre de Rio se marche bien. Toutefois, les rues ne forment pas une grille, en raison de la physionomie des lieux. Par exemple, le quartier de Santa Teresa, perché sur la colline du même nom, est un peu compliqué à explorer, au début. Mais bon, le plaisir de se perdre a son charme. L’important, c’est de s’assurer de ne pas entrer dans des zones « à risque », comme une favela. Je suis ainsi entré par inadvertance dans la Comunidade Santo Amaro, en plein jour. Je raconterai cette expérience plus en détails dans un autre billet, car je crois qu’elle mérite un traitement particulier. Rio possède une réputation peu enviable, en matière de sécurité, et cette question ne peut être évacuée, quand on découvre la ville.

Une rue tranquille du quartier Santa Teresa

Après des heures de marche et des dizaines de milliers de pas (selon mon podomètre), j’ai constaté que Rio avait sa propre personnalité. Elle appartient à ce que j’appelle les « villes de classe mondiale », ces villes qui se démarquent par leur caractère unique. Ce caractère peut être forgé par de nombreux facteurs; dans le cas de Rio, on pourrait mentionner ses plages, ses montagnes, sa superficie, sa richesse culturelle, son énergie, etc. Une ville de classe mondiale se reconnaît d’une façon simple: on la nomme comme point de référence pour effectuer des comparaisons. On pourrait aussi résumer ce statut par la phrase suivante « il n’y a pas deux villes comme _________(insérez nom ville)_________ ».

Au coeur de la bête

Rio de Janeiro, surnommée la « Cidade Maravilhosa » (« Cité merveilleuse »), a une tortueuse histoire, intimement liée à la colonisation de l’Amérique du Sud. Je ne m’attarderai pas sur cette histoire, ce serait trop long de la raconter et je ne suis pas historien, mais je peux souligner que la ville a été officiellement fondée par les Portugais, en 1565. Elle a connu une importante croissance au fil des siècles grâce au commerce du sucre, de l’or, des diamants et pierres précieuses et à l’esclavagisme. Elle a subi les contrecoups des intrigues politiques du Portugal, de l’Indépendance du Brésil et des périodes de l’Empire, de la République et de la dictature militaire. Elle s’est peu à peu hissée au rang de ville internationale de premier plan, comme en témoigne la tenue d’événements majeurs comme le Sommet de la Terre (1992 et 2012), les Journées mondiales de la jeunesse (2013), les finales de la Coupe du monde de football (1950 et 2014) et les Jeux olympiques d’été (2016).

Le siège social de Petrobras, la compagnie pétrolière nationale et la plus grande entreprise du pays.

Même si elle est plus « petite » que São Paulo et ses 12 millions d’habitant-es (sur plus de 1500 kilomètres/carrés de superficie. Si on inclut la « macrométropolis », on parle alors de près de… 34 millions d’habitant-es, sur une superficie de plus de 53 000 km2), Rio n’en demeure pas moins une ville tentaculaire, avec près de 7 millions d’habitant-es réparti-es sur une superficie d’environ 1220 km2 (ou plus de 12 millions  d’habitant-es sur une superficie de plus de 4500 km2, dans l’ensemble de son aire métropolitaine). On est loin de Saint-Mathias-de-Bonneterre. Je sais, j’adore nommer ce village dans mes billets. Ce n’est pas par méchanceté, au contraire; j’y ai des racines, en fait. Et oui, ce village est minuscule.

Saint-Mathias-de-Bonneterre, terre familiale.

Une ville d’une telle envergure présente par conséquent de nombreuses facettes, reflétant sa complexité. Je ne nourris pas l’espoir de dresser un portrait « complet » ou « ultime » de ce que Rio a à offrir, comme je vois hélas trop souvent dans certains titres d’articles pompeux (sérieusement, qui a le culot de croire tout connaître d’un lieu?), alors je vais me concentrer sur mes seules expériences.

J’ai trouvé l’escalier du film « L’Exorciste »

Activités

Ma principale activité? Marcher. Pour ce premier séjour, je me suis concentré sur les quartiers suivants: Glória, Santa Teresa, Lapa, Catete. Ainsi, le 4 septembre, je suis parti de mon auberge, près du métro Gloria, et je me suis dirigé vers le nord, sans plan. Je me laissais guider par mes impressions. Je suis tombé sur diverses attractions, comme une murale en l’honneur d’Ayrton Senna (il n’a jamais été oublié., même s’il est mort en 1994), les Arcos Da Lapa ou la Catedral Metropolitana de São Sebastião. Je reviendrai sur ces attractions dans mon prochain billet. Je vais me concentrer ici sur les activités que j’ai effectuées.

Ayrton Senna, le Gilles Villeneuve brésilien

Je suis ensuite passé à côté du siège social de la compagnie Petrobras et de son architecture de type « hommage à Tetris ». Surprenant édifice. Juste à côté, sur la Praça Estado da Guanabara, j’ai assisté à une foire du livre. J’ai acheté un livre, O marxismo diante das sociedades primitivas, de Emmanuel Terray, pour 3 reais (environ 0,95 $ CAN). Un livre idéal pour épater la galerie lors d’un 5 à 7 avec des étudiant-es de sciences politiques. Comme dans toute foire digne de ce nom, on y peut y dénicher une large variété de livres, des essais politiques aux romans à l’eau de rose en passant par des livres de cuisine. J’ai aperçu quelques disques perdus dans les rayons, dont un album de Céline Dion. Elle est vraiment partout. Je n’ai rien contre elle, en fait, mais ces temps-ci, je suis plus dans une phase « funeral doom des pays de l’Est » (oui, je sais, c’est précis). Bref, j’adore ce genre d’événement, même si j’ai déjà plein de livres dans ma collection. Je n’ai bien sûr pas eu le temps de tous les lire. Malgré cela, j’en rachète toujours plus. Je me berce de l’illusion que je finirai – un jour – par rattraper mon retard.

Une agréable foire du livre

Un peu plus loin, j’ai bu un délicieux smoothie au maté et à la baie d’açaï, une gracieuseté de O Rei do Mate, une chaîne qui vend divers produits à base de yerba maté, des boissons chaudes et des goûters légers. La chaîne a été fondée en 1978 et elle compte aujourd’hui plus de 280 succursales dans 17 États du pays. D’ailleurs, j’ai acheté une marque brésilienne de yerba, mais elle était trop poudreuse à mon goût. Elle donnait un genre de pâte dans ma calebasse. En discutant avec une employée argentine d’une de mes auberges, j’ai appris que, si des gens consommaient du maté au Brésil, les produits locaux n’étaient pas de la meilleure qualité. Elle m’a avoué qu’elle ne consommait que des produits d’Argentine et qu’elle demandait à ses amis de lui en rapporter, s’ils allaient là-bas.

Déception

Je me suis dirigé vers la Praia do Flamengo. Des jeunes y jouaient au volleyball, malgré le mauvais temps. Le Pain de Sucre (« Pão de Açúcar ») me faisait de l’oeil à travers les nuages. Je me disais « tu ne perds rien pour attendre, toi ». Je me suis approché des vagues et j’ai testé l’eau à l’aide de mes doigts les plus courageux; fraîche. La baignade tant désirée allait attendre encore. Pour me consoler, j’ai passé de longues minutes à admirer des chats au Parque do Flamengo. Ils étaient tous aussi mignons les uns que les autres. J’avais envie de tous les flatter et de les ramener chez moi.

Comment ne pas les aimer?

En revenant vers le centre, j’ai arrêté dans une succursale de Cheirin Bão, une chaîne de cafés. J’y ai bu un espresso, afin de reposer mes pauvres jambes. Café invitant, où il ferait bon étudier ou travailler. J’ai par la suite visité le disquaire Zapapi’s CD Som.  Je n’ai pas remarqué de section métal, mais les artistes rock/pop/samba volaient la vedette. Le vinyle occupait une place de choix dans les rayons, mais depuis mon achat du simple Dr. Stein (1988) de Helloween chez un disquaire de Berlin, en 1998, je n’achète plus de vinyle en voyage. Trop fragile, trop compliqué de le traîner sans l’endommager. Je me suis plutôt rabattu, pour 18 reais (environ 5,73 $ CAN), sur le disque compact A Vida nos Ensina (2002), le deuxième album de Tihuana, un groupe de São Paulo. Ne pouvant écouter l’oeuvre avant de l’acheter, je l’ai évaluée selon les critères habituels: les thèmes du titre et des chansons, la pochette, le look des musiciens, l’année de parution, le nom de la compagnie. D’ordinaire, ces indices dessinent un portrait assez juste du style musical d’un disque. Je m’attendais donc à une version diluée de Korn/Limp Bizkit, mais, au final, j’ai eu droit à un genre de rock/métal aux accents funk/ska. Pas mauvais.

Je suis ensuite tombé par hasard sur l’Escadaria Selarón – et ses hordes de touristes en quête de la parfaite photo Instagram -, puis je me suis promené dans le quartier Santa Teresa. Sympathique quartier, rempli de restaurants, de bars et de boutiques, entre autres. Un milieu bobo, version brésilienne. J’y ai aussi vu des églises, comme la très jaune église de la Paróquia Santa Teresa de Jesus et la discrète Igreja Ortodoxa Russa Patriarcado de Moscou- Paróquia de Santa Zenaíde. Dans un restaurant, j’ai effectué ma première vraie tentative de conversation en portugais. Laborieux essai, en toute franchise, mais comme chaque fois que je m’efforce de pratiquer les notions théoriques d’une nouvelle langue, j’ai pu compter sur le soutien et la bonne humeur de mes interlocuteurs. Les locuteurs natifs apprécient les efforts déployés par les touristes qui apprennent leur langue, et ce, peu importe le pays.

L’église de la Paróquia Santa Teresa de Jesus

Le 5 septembre, j’ai pris la direction sud, jusqu’au square Largo do Machado. J’y ai goûté à de la cuisine de rue. J’avais plusieurs options, alors j’ai choisi des coxhinas, des croquettes farcies (à la viande, au fromage). J’ai par ailleurs noté que des vendeurs ambulants acceptaient les cartes de crédit. Intéressant. Un marché aux puces se tenait sur le square lors de mon passage et, comme le temps frais sévissait, j’ai acheté une chemise à manches longues pour 10 reais (environ 3,18 $ CAN). Acheter un vêtement chaud. À Rio. Situation absurde.

Une coxinha…

Dans la soirée du 6 septembre, je me suis rendu au Maya Café, un joli café/traiteur populaire auprès des étudiant-es. On y vend du café (duh), des desserts (dont un délicieux gâteau carotte et chocolat), des bières de spécialité, des boissons diverses et des repas légers. En plus, tous les vendredis, si la température le permet, des spectacles jazz gratuits (mais avec contribution volontaire) sont présentés sur la terrasse, avec le quatuor All Brazz Quarteto. Ainsi, malgré une faible pluie, j’ai assisté à une solide performance du quatuor. Je ne suis pas un grand fan de jazz, mais en spectacle, je peux apprécier le talent des musicien-nes. C’est la raison pour laquelle, chaque année, je me fais un devoir d’aller au moins une fois au Festival international de jazz de Montréal. J’y ai vu des spectacles extraordinaires, dont celui de Stevie Wonder (avec 200 000 personnes) ou de Room Eleven. Mais je digresse. Encore. Si vous cherchez un café pour travailler ou étudier, je vous recommande ce lieu. Tout près du métro Gloria.

Maya Café: café, gâteau et jazz.

De nombreux restaurants – aux menus et prix différents – ont pignon sur rue entre les stations Catete et Gloria. De plus, des vendeurs de cuisine de rue parsèment le secteur, offrant brochettes, burgers, hot dogs, desserts, pitas et autres aux passant-es. J’ai en outre été étonné par les prix de certains restaurants: avec le taux de change, un repas ici pouvait coûter presque autant qu’un repas semblable à Montréal. Je ne m’attendais pas à cela. Bien sûr, cuisiner dans les auberges demeure l’option la plus économique, mais, toujours curieux de découvrir les spécialités locales, je ne peux m’empêcher d’essayer différents restaurants lors de chacun de mes voyages. Et puis, côté « pâtes au thon en sauce tomate cuisinées à la hâte dans une casserole bosselée qui a connu de meilleurs jours»… j’ai déjà donné. Ceci dit, je ne me considère pas comme un gastronome, je me fous pas mal des restos haut de gamme, je préfère goûter ce que la « plèbe » mange. Il n’y a rien comme partager un burger garni au coin d’une rue avec des habitant-es du quartier pour se sentir ancré dans le rythme de l’endroit.

La suite de ce billet sera publiée sous peu.

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